Il y a 180 ans.
Il découvrit les jambes. Elles étaient de nouveau glacées, une cyanose épaisse avait dépassé le genou et marquait déjà largement les cuisses. Toutefois, sous les frictions qu'Angélo faisait aller de plus en plus vite, il lui sembla que la chair s'amollissait, tiédissait, reprenait un peu de nacre. Il activa le mouvement. Il se sentait une force surhumaine. Mais, en dessous du genou, les jambes restèrent glacées et maintenant lie de vin. Il tira le corps près du feu. Il fit chauffer des pierres. Dès qu'il s'arrêtait de frotter, la cyanose sortait du genou, arborescente comme une sombre feuille de fougère et montait la cuisse. [...] Il semblait indifférent à tout ; mais à un moment où Angélo, sans se rendre compte, poussa un soupir où il pouvait y avoir un peu de contentement (il venait encore une fois de chasse la cyanose de la cuisse) sans quitter son air atone, le jeune homme tâtonna des doigts autour de sa chemise, la souleva et montra son ventre. Il était d'un bleu total, effrayant.
Jean Giono, Le Hussard sur le toit, Paris, Gallimard NRF, rééd. 1995, p. 57
Si les crises frumentaires s'estompent au XIXe siècle, il est des épidémies qui ravagent toujours le pays... Et parmi elles, le choléra. L'année 1832 est particulièrement restée dans les mémoires, avec le roman de Jean Giono, Le Hussard sur le toit (écrit en 1951) et ses morts célèbres (le physicien Sadi Carnot, l'homme politique et banquier Casimir Perier, l'égyptologue Jean-François Champollion ou encore l'ancien roi de France Charles X en exil). Cette vague s'étire jusqu'en 1835, puis des foyers ressurgissent en 1849-1850, 1854-1855, 1865-1866 et 1885-1886...